Pour certains adultes, l’écriture manuscrite est un pensum. C’était le cas de Nolwenn, 25 ans, qui trouvait son écriture enfantine et peu lisible. Aussi loin qu’elle se souvienne, l’écriture n’a jamais été une partie de plaisir. Pourtant, le confinement a été l’occasion pour elle de rééduquer son geste d’écriture avec succès.
On entend souvent dire qu’au-delà de l’école primaire, il est trop tard pour une rééducation de l’écriture. Or, la problématique soulevée dépend bien plus de la nature des difficultés que de l’âge de la personne. On constate même très souvent que la rééducation de l’écriture est rapide et efficace chez les adolescents ou jeunes adultes fortement impliqués.
La motivation personnelle, un atout gagnant pour changer d’écriture
C’est un nouveau challenge professionnel qui a poussé Nolwenn à entreprendre une remédiation en écriture au cabinet La Manuscrite à Nouméa. Dotée d’une détermination incroyable, Nolwenn avait un objectif précis : être capable de rédiger – sous deux mois – un dossier de candidature manuscrit de qualité. Deux séances seulement ont été nécessaires à Nolwenn pour atteindre son but. Et même au-delà, puisque sa candidature a été retenue !
L’entraînement intense est nécessaire à l’automatisation du geste
En plus d’un objectif clair, Nolwenn a choisi son calendrier pour se rééduquer. Rencontrée juste avant le confinement, elle a mis à profit cette période à la maison pour s’entraîner trente minutes chaque jour. Ainsi, grâce à la régularité de son travail, elle a pris de nouvelles habitudes d’écriture. Elle a corrigé sa posture, adopté une tenue de crayon efficace et rectifié ses appuis. Son geste d’écriture est maintenant rapide, lisible et surtout confortable.
Posture et tenue de crayon se réapprennent aussi à l’âge adulte
Comme beaucoup d’élèves, Nolwenn ignorait qu’il faut incliner son support pour écrire. Elle gardait sa feuille droite, face à elle, et cassait son poignet1 sur la ligne d’écriture. Elle tenait son crayon à quatre doigts, très près de la mine, avec une pression excessive sur le majeur. Sans surprise, l’écriture de Nolwenn était laborieuse et douloureuse. Sa vitesse ne dépassait guère celle d’un élève de 5ème mais aujourd’hui, son geste est souple et rapide.
L’écriture cursive se trace dans un mouvement continu
Le geste d’écriture de Nolwenn était également interrompu par des levées de crayons inutiles. Or, l’écriture cursive2 est une écriture tracée « à la main courante ». Les lettres se combinent entre elles dans un mouvement fluide. Nolwenn avait une belle écriture en puissance mais aucun moyen de la laisser courir sur le papier. Nous avons donc travaillé sur le rythme et la continuité du geste ainsi que sur la formation de certaines lettres.
L’apprentissage initial lacunaire, une vraie fausse dysgraphie
On retrouve ici tous les ingrédients non pas d’une dysgraphie mais d’un apprentissage initial incomplet. Position de la feuille, tenue de crayon, formation des lettres ne sont pas des gestes innés. Inconscients chez les adultes, ils sont pourtant le fruit d’un apprentissage rigoureux qui doit être mené dès le début de l’école primaire. Ce n’est qu’une fois au collège, après des années de pratique de l’écriture, que les élèves commencent à automatiser leur geste graphomoteur. Il faut donc du temps et beaucoup d’entraînement pour devenir un bon scripteur.
Enseigner l’écriture manuscrite, une urgence pédagogique
Nous l’avons vu, améliorer son écriture est encore possible à l’âge adulte. Pourtant, on sait que l’écriture facilite les apprentissages. Bien écrire aide à bien lire, renforce la mémorisation, structure la pensée, libère la créativité. À l’inverse, une faible maîtrise de l’écriture manuscrite en primaire est souvent corrélée à un parcours scolaire difficile. Il est donc urgent de redonner toute sa place à l’enseignement de l’écriture manuscrite dans notre système scolaire.
Anne-Soline Sandy – www.lamanuscrite.nc
Rééducation de l’écriture à Nouméa, Nouvelle-Calédonie.
1 – Poignet cassé : On retrouve également cette position chez les gauchers qui n’ont pas appris à décaler et à incliner leur feuille : décaler à gauche pour éloigner la feuille du buste, incliner à droite, dans l’axe du bras, pour placer la main sous la ligne d’écriture. Feuilles et cahier droits, incitent les enfants gauchers à casser le poignet au-dessus de la ligne d’écriture pour voir ce qu’ils écrivent et ne pas faire baver l’encre.
2 – Écriture cursive : du latin currere qui signifie courir, une écriture tracée « à la main courante ».
Pour aller plus loin
PIERSON Laurence
Bien écrire et aimer écrire
Éditions MDI, 191 pages, avril 2020.
Cet ouvrage a été rédigé par une graphopédagogue, ancienne professeur des écoles et membre fondateur de l’association 5E (Enseignement de l’Écriture pour Élèves, Étudiants et Enseignants). Extrêmement clair et abondamment illustré, « Bien écrire et aimer écrire » est destiné aux enseignants, aux éducateurs, aux parents, ainsi qu’aux professionnels paramédicaux qui remédient aux troubles de l’écriture.
Quelques cours particuliers de remédiation en écriture permettent de dépasser bien des difficultés. Pour prendre rendez-vous : cliquez ici.